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De Nicolas Niort,

le 18 décembre 2013

La révolution des crevettes

 

 

 

 

 

 

 

 

Selon une vieille légende[1], Manco Capac et sa sÅ“ur Mama Ocllo, sortirent des eaux du lac Titicaca, le plus haut lac navigable du monde et fondèrent la ville Inca de Cusco, nom signifiant en quechua : le nombril du monde.

 

Décembre 2010, Bolivie.

C’est dans ce petit pays enclavé au milieu des Andes amérindienne qu’une loi inédite fut déclarée : celle des droits de la Terre-mère.

Est-ce ici, au centre de l’Amérique latine, que l’on trouve le cÅ“ur d’une révolution éthique et humaine sans précédent ?

 

 

Qu'est-ce que la « Ley de derechos de la Madre Tierra » ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les germes d’une révolution spirituelle

 

« Dans beaucoup de sociétés, l’état d’esprit dominant est celui de l’homme démiurge voulant s’affranchir de la nature et dompter ce que nous appelons encore « environnement Â», comme si nous n’en faisions pas partie. Or la notion de Terre mère n’est pas une métaphore, c’est une réalité puisque c’est elle qui nous nourrit Â»[2].

 

A l’instar de la réflexion du penseur agro-écologiste Pierre Rabhi,  la divinité andine connue sous le nom de « Pachamama Â» est une incarnation de la Terre nourricière. En zone rurale, la population voue un profond respect au vivant et a pris conscience de l’existence d’une interdépendance entre l’humain et la Nature.

La Terre-mère c’est la Terre maternelle, celle qui permet la naissance et l’évolution. C’est aussi la Terre nourricière, celle qui habilite la Vie. Ce niveau de conscience, cette relation avec la Terre est vécue comme un profond respect. 

 

« L’indigène comme Ã©cologiste naturel Â» est une formule des chercheurs argentins Diego Domínguez et Daniela Mariotti, qui s’est diffusée dans toute la société et qui a fini par atteindre la sphère politique à travers le président actuellement en fonction : Evo Morales. Politiquement, la loi de la Terre-mère est une éthique qui a été érigée en hymne :

 

« Si le 20ème siècle a été le siècle de la reconnaissance des droits de l’homme, le 21e sera celui des droits de la Terre et de tous ses êtres vivants Â» - E. Morales.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Porte-parole des peuples indigènes, le premier Président sud-américain d’origine amérindienne est issu d’un milieu très modeste. Ayant abandonné très tôt sa scolarité pour subvenir aux besoins de sa famille, il fut rapidement touché par les inégalités sociales et économiques dont sont victimes les petits producteurs. Sa prise de conscience s’était alors incarnée dans un engagement politique, en commençant par la lutte syndicale. Concernant la sphère politique, c’est par une logique socialiste qu’il s’est engagé sans cesse en faveur des droits humains puis dans une dimension plus large, celle de la défense du vivant.

 

Insufflant au pays une orientation écologique, la politique du gouvernement a introduit dans la sphère publique un certain nombre d’obligations légales. La Terre étant dorénavant considérée officiellement comme une entité de droit, l’orientation des choix politiques du pays se fait par rapport à elle.

 

Mais dans une nation en proie à une forte pauvreté, l’enjeu central de la protection de la Terre n’est pas sans poser de nombreux problèmes. En effet, ce pays étant doté d’abondantes ressources naturelles (café, mines, gaz), les solutions à trouver afin de maintenir un équilibre entre le besoin réel d’amélioration des conditions de vie et le maintien d’un respect des écosystèmes environnants sont complexes, mais elles sont nécessaires.

 

 

« Small bang Â»

 

Etonnante découverte scientifique que celle-ci : une crevette pistolet peut produire plus de bruit qu’un avion au décollage.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nombreux sont les faits qui témoignent que les « petits Â» peuvent, en coopérant, accomplir de grandes choses ; les crevettes pistolet perturbant le sous-marin ou une cohorte de fourmis terrassant une araignée sont des exemples flagrants de la force de la coopération et de l’entente.

 

A l’échelle citoyenne, le combat récemment amorcé via une pétition afin de stopper le chalutage en eaux profondes qui détruit les écosystèmes des fonds marins[6], a été un succès. Si la décision ne fut pas d’ordre politique, les distributeurs se sont engagés face à la pression de la société civile, à ne plus commercialiser les poissons issus de ce type de pêche[7]. 750 000 signataires ont permis de constituer un lobby puissant qui s’est avéré victorieux.

 

Comme le montrent le modèle bolivien ou les initiatives citoyennes, les possibilités d’actions se trouvent entre les mains de tous. Agissons et créons, pour que les graines du possible puissent germer et fleurirent, tant au niveau local qu’à l’échelle globale.

 

 

 

 

 

Notes :

[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Manco_C%C3%A1pac

[2] Rabhi Pierre et Hulot Nicolas, Graines de possibles, regards croisés sur l’écologie, 2005

[3] http://www.actu-environnement.com/ae/news/accord-cancun-climat-11548.php4

[4] http://www.monde-diplomatique.fr/2011/02/LAMBERT/20148

[5] http://fr.wikipedia.org/wiki/Crevette_pistolet#cite_note-Patek_and_Caldwell-2 et http://www.gurumed.org/2013/05/25/lincroyable-attaque-de-la-crevette-pistolet-au-ralenti-vido/

[6] http://www.penelope-jolicoeur.com/2013/11/prends-cinq-minutes-et-signe-copain-.html?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+BlogPenelopeJolicoeur+%28BlogPenelopeJolicoeur%29

[7] http://oceans.greenpeace.fr/10-decembre-2013-une-journee-decisive-pour-le-chalutage-en-eaux-profondes

 

En effet, la crevette pistolet a la particularité d’utiliser une de ses pinces comme un pistolet. En la rétractant brusquement, elle crée une bulle, qui en implosant, crée une chaleur supérieure à 5000 degrés et une onde acoustique de 200 décibels, soit une valeur supérieure à celle d’un Boeing. Cela lui sert notamment à tuer ses proies ou à briser des coquilles. Plus stupéfiant encore, dans les zones où elles sont très nombreuses elles pourraient ensemble perturber le fonctionnement des sonars des sous-marins[5].

En signe de gratitude, l’Etat Bolivien a octroyé les droits suivants Ã  la Terre-Mère :

  • Droit à la vie ;

  • Droit de perpétuer les processus naturels indépendamment de toute intervention humaine ;

  • Droit à l’eau et à l’air pur ;

  • Droit à être exempt de pollution ;

  • Droit à la diversité et à la non modification cellulaire ou génétique ;

  • Droit de la nature à ne pas être affectée par des projets d’infrastructures ou de développement qui pourraient perturber l’équilibre des écosystèmes ou des populations.

Au niveau international, la Bolivie, en rejetant en 2010 l’accord international de Cancun sur la lutte contre le changement climatique[3], fait office de « rebelle Â». Et selon les mots du président Morales, la démarche est justifiée,  car il s’agit d’incarner : « un nouveau paradigme planétaire afin de préserver la vie Â»[4]. Rejetant donc la partition internationale, la Bolivie a choisi de jouer une autre mélodie.

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